CONFÉRENCE INTERNATIONALE
"EAU ET DÉVELOPPEMENT DURABLE"
Paris - 19/20/21 mars 1998 |
Documents de travail - Ateliers d'experts (I) - L'amélioration de la connaissance des ressources et des usages de l'eau pour une gestion durable -
1. Les ressources en eau douce continentale sont
rares. Elles présentent une grande irrégularité interannuelle
et une forte variabilité saisonnière. Elles sont très
inégalement réparties entre les continents et entre les pays,
voire entre les régions dun même pays.
2. Laction humaine est de
plus en plus sensible et certains aménagements, des
prélèvements abusifs ou des rejets polluants ont pour effet de
modifier le régime naturel des eaux, de dégrader la qualité
des ressources, ou de perturber les écosystèmes.
3. Au niveau mondial, les
consommations ont été multipliées par un facteur de
lordre de 7 depuis le début du siècle et ont doublé
durant les 20 dernières années. Cette augmentation se poursuit,
même si dans certains pays industrialisés, la consommation
semble plafonner, voire baisser pour certains usages.
4. Dans ces conditions, une
connaissance approfondie, pertinente et facile daccès aux
différents niveaux où elle est utile, des ressources en eau et
des différents usages et de leurs évolutions, ainsi que des
interactions avec les milieux environnants, est une condition
essentielle pour tendre vers une gestion plus intégrée et
durable permettant de faire face aux défis du siècle prochain.
Cependant,
I.1 CETTE CONNAISSANCE
DES RESSOURCES ET DES USAGES RESTE INSUFFISANTE :
- I.1.1 - Selon
les pays, les données nexistent encore que de façon
incomplete ou fragmentaire:
5. Bien quencore souvent
très incomplètement, on dispose, en général, sous des formes
diverses, de données :
* sur la météorologie et,
notamment la pluviométrie,
* sur l'hydrologie des cours
d'eau, au moins des débits ou les hauteurs d'eau sur les
principaux fleuves et affluents,
* sur le niveau des grands
réservoirs,
* sur la piézométrie des
nappes d'eau souterraine ...
6. Par contre, les données
n'existent pas, ou sont plus difficilement disponibles, en ce qui
concerne :
* les qualités de l'eau des
rivières et des nappes, ou de l'eau potable distribuée,
* les prélèvements, les
consommations nettes, lefficience des usages, * les
rejets polluants de toutes natures et de toutes origines,
* la biologie des milieux ou
l'eutrophisation,
* les transferts entre milieux
naturels (rivières, versants, alluvions, nappes, zones
humides...), tant en débits qu'en pollution,
* l'utilisation des sols dans
les bassins versants et ses corrélations avec le régime des
eaux ...
* les transports solides, etc
...
7. Peu d'indications sont
également disponibles sur les ouvrages, réseaux et
équipements, sur les investissements ou les coûts, ainsi que
sur les prix de l'eau éventuellement pratiqués et d'une façon
générale la socio-économie de l'eau.
- I.1.2 - Les
informations sont dispersées et hétérogènes :
8.* dispersées,
parce qu'en général, les données, quand elles existent, sont
réparties entre plusieurs organismes gestionnaires, aux
compétences parfois mal définies,
9. La situation est compliquée
pour les fleuves et aquifères transfrontaliers lorsquen
absence daccords internationaux, chaque pays riverain ne
détient, et sous des formes qui lui sont propres, que la partie
fragmentaire de l'information concernant son seul territoire.
10. * Hétérogènes,
parce que, la plupart du temps, chaque producteur de données et
chaque gestionnaire de banques d'information a classiquement
développé, souvent d'ailleurs de façon efficace, son système
en fonction de sa logique, de ses moyens et besoins propres, sans
qu'une concertation suffisante ait eu lieu avec les autres
systèmes d'information complémentaires, ni avec les différents
usagers possibles des données.
- I.1.3 - Les
informations ne sont pas assez pertinentes, en ce qui
concerne :
a) la
continuité et la durée des observations :
11. Il nest ainsi pas
toujours possible de disposer des séries chronologiques
continues et longues sur un même site, permettant des
estimations de ressources sur des périodes de temps conformes
aux besoins de la gestion, ainsi qu'une connaissance et une
prévision des situations extrêmes de crue ou de sécheresse et
de leurs risques d'occurrence.
12. Il en est de même en ce qui
concerne la qualité de l'eau et les rejets, lorsquelle
fait lobjet dun suivi, ce qui ne permet que trop
rarement de connaître ses variabilités dans le temps, ainsi que
la fréquence et la probabilité des événements accidentels.
b) la fiabilité :
13. La précision des valeurs qui
sont mesurées, doit être suffisante pour satisfaire aux
objectifs de connaissance ou de gestion. Mais cela est assez
généralement loin d'être le cas, pour un certain nombre de
raisons, d'ordre instrumental, hydraulique ou géologique ou
encore très fréquemment du fait de l'insuffisante qualification
professionnelle des opérateurs ou de l'absence de procédures de
contrôle de la qualité.
c) la
représentativité des sites de mesures et d'échantillonnages :
14. La localisation et le maillage
des stations et la périodicité et la nature des mesures et
analyses doivent être organisées en fonction des réalités à
observer et à l'évolution des besoins dinformation.
15. De manière générale, la
collecte doit être dautant plus serrée et soignée que
les disponibilités en eau sont faibles en regard des besoins et
que les prélèvements ou les rejets sont plus importants ou plus
denses ou quil existe des risques particuliers.
d) la nature
des paramètres suivis :
16. De même, le choix des
paramètres à analyser, pour décrire la qualité des eaux de
surface ou des nappes ou pour qualifier les rejets, est
évidemment fonction de la nature même de ceux-ci, de la
sensibilité des milieux récepteurs ou des usages à satisfaire.
- I.1.4 - Il
existe encore trop peu de " systèmes
dinformation intégres " a fins multiples :
17.De tels systèmes assurent une
cohérence entre toutes les étapes nécessaires :
- aux mesures et
échantillonnages sur le terrain,
- aux analyses de laboratoire,
- au contrôle de la qualité des données,
- à la transmission en temps réel ou différé,
- à la constitution des banques de données,
- à ladministration des données,
- à la conception et à lélaboration des produits et
applicatifs de valorisation,
- à la diffusion de linformation élaborée, sous la
forme appropriée, vers les différents utilisateurs.
- I.2 - LES
OUTILS DAIDE A LA DECISION RESTENT INSUFFISAMMENT
DEVELOPPÉS :
- I.2.1 - Les
concepts utilisés restent flous ou peu operationnels :
18. Dans la pratique courante,
lévaluation des ressources, des usages ou des rejets se
réduit à la sommation de données brutes de débits, de
volumes, de totaux pluviométriques ou de quantités de matières
polluantes.
19. Les statistiques de ressources
ou de consommation établies à partir de chiffres moyens ne
reflètent pas les variations saisonnières ou interannuelles et
les estimations globales réalisées dans les cadres territoriaux
habituels (continent ou pays) ne prennent pas en compte la plus
ou moins heureuse répartition spatiale des ressources, des
activités utilisatrices d'eau ou de la concentration des
populations et reposent sur des extrapolations souvent très
sommaires, etc ...
20. Des concepts indispensables ne
sont pas encore introduits de façon courante dans les approches,
comme celui de "ressources régulières", dont la
disponibilité serait assurée pour une périodicité
interannuelle forte, ou celui de "ressources
utilisables", qui tiendrait compte des difficultés
technologiques de mobilisation ou de traitement ou de leur coût
financier, empêchant leur utilisation effective, ou encore des
impacts sur le milieu naturel, et de l'obligation de débits
réservés d'étiages dans les cours d'eau.
21. Une des causes de la
non-intensification des cultures pluviales est labsence
doutils de prévision qui permettent de prévoir et gérer
les investissements en intrants, ou doptimiser une petite
irrigation de complément, tout comme sont très mal observées
des pratiques traditionnelles comme lépandage de crue dans
les pays arides.
22. On est objectivement dans
lincapacité dévaluer quelles pourraient être les
conséquences de leffet de serre sur le régime des eaux ou
sur les processus de désertification.
23. Dune façon générale,
si malgré ces défauts, un effort important a été mené ces
dernières décennies pour aboutir à une meilleure connaissance
des mécanismes du cycle hydrométéorologique, la connaissance
paraît beaucoup moins avancée et moins élaborée en ce qui
concerne la qualité et les mécanismes qui régissent les
demandes en eau, la pollution et l'évolution des milieux
naturels associés.
24. Peu de chiffres existent sur
les consommations et la plupart des usagers eux-mêmes ne savent
pas ce quils prélèvent, ni ce quils rejettent
réellement. La notion defficience des usages reste à
développer concrètement.
25. Il y a généralement
confusion dans les chiffres entre les prélèvements bruts de
l'eau et les consommations nettes effectives, compte tenu des
rejets et des retours au milieu naturel.
26. C'est le cas de l'évaluation
globale des rejets polluants et surtout de l'efficacité des
systèmes d'épuration et de tout ce qui touche à la
détermination d'indices synthétiques de la qualité de l'eau ou
des milieux, dont l'approche n'est que balbutiante.
27. Il en est de même des
concepts émergents de la valeur patrimoniale de l'eau et de
l'équilibre des écosystèmes, même s'ils font progressivement
leur chemin.
28. Les observations nécessaires
à lévaluation des impacts de tous ordres des grands
projets ne relèvent pour linstant que de projets de
recherche, de même que lon ne sait pas apprécier
leffet de la multiplication des petits aménagements.
29. Certaines utilisations sont
également caractérisées par de très faibles prélèvements en
quantité, mais peuvent être associés à des rejets toxiques
très concentrés, qui dénaturent à l'aval la qualité de
volumes d'eau considérables, dégradant les milieux naturels et
empêchant certains usages. La mesure de ces rejets, les
méthodes dévaluation de leurs effets à court et surtout
à long terme, létude de leur comportement (fixation par
les sédiments, relargages, etc ...) nen sont quà
leur début.
30. Enfin, une bonne part de
lapproche socio-économique des usages de leau
nest pas développée, faute dindicateurs pertinents
ou tout simplement de données disponibles.
- I.2.2 - Lélaboration
de produits modernes de valorisation des donnees nen
est quà son début :
31. Linformation, en effet,
pour être utile, ne doit pas rester sous forme de données
brutes, mais doit être restituée sous une forme compréhensible
et utilisable par les différentes catégories
dutilisateurs.
32. Elle doit être organisée en
fonction de besoins nombreux et divers, quils
sagissent de létude de " livres
blancs ", de schémas directeurs de gestion et
daménagement des eaux, de programmes dintervention,
de simulations budgétaires ou dassiettes de redevances, de
la délivrance des autorisations administratives ou
détudes des projets, de régulation des ouvrages,
dalerte ou bien encore de lévaluation des résultats
des politiques mises en uvre et du suivi de
lévolution de létat des milieux (...), enfin de
linformation du public ou de la vulgarisation ...
33. Tous ces différents
besoins nécessitent lélaboration de " produits
de valorisation " adaptés, alors que le plus
souvent on ne peut accéder encore quà des annuaires
dactylographiés ou imprimés, (voire parfois encore écrits
manuellement), renvoyant à des colonnes de chiffres
dexploitation très fastidieuses et totalement
inutilisables, en particulier, par des usagers non
professionnels.
34. Une restitution sous forme de
courbes, de schémas ou de cartes, visualisant les évolutions,
les rapports dordre de grandeurs ou la localisation
géographique des phénomènes décrits, nest pas encore
systématiquement organisée.
35. Linformatisation
indispensable des services reste encore trop embryonnaire et les
logiciels de gestion moderne des données, de modélisation ou de
restitution ne sont pas suffisamment diffusés.
36. Souvent, les tâches de
collecte, mais surtout de centralisation et de conservation des
données, relèvent dorganismes de recherche, qui ne sont
pas forcément impliqués directement dans les fonctions
dadministration ou de gestion de leau ou
dexploitation des ouvrages, et nont pas forcément,
du fait de cette dichotomie des tâches, une vision adaptée des
" produits " de valorisation des données,
dont devraient pouvoir disposer de façon très opérationnelle
les différentes catégories dutilisateurs possibles.
37. Avec les moyens modernes
disponibles, les " systèmes dinformation
intégrés à fins multiples " peuvent permettre à
tous les niveaux utiles lorganisation de dispositifs
dalerte, de gestion optimisée des ouvrages ou des
modélisations permettant de simuler, dans différents scenarii,
les évolutions qualitatives ou quantitatives des différents
paramètres utiles à la prise de décision : force est de
constater que, si de tels systèmes existent, leur
généralisation semble encore bien lointaine.
38. Les travaux sur la prévision
opérationnelle des ressources, comme des demandes, ainsi que les
approches prospectives restent ponctuels.
- I.2.3. - La
fonction dadministration des données na pas
acquis une place suffisante :
39. Même si des travaux très
importants ont été entrepris, notamment par les Agences des
Nations Unies ou par l'Union Européenne, une harmonisation
méthodologique nationale, régionale et a fortiori
internationale nest pas encore réellement possible et les
pratiques des différents producteurs de données et
gestionnaires de base restent très hétérogènes.
40. Or, il est indispensable de
tendre plus que jamais vers :
- des dictionnaires décrivant
précisément l'information à fournir pour chaque
paramètre,
- des nomenclatures
générales,
- des référentiels
géographiques et cartographiques harmonisés,
- des formats standards
d'échange de données informatisées,
- des catalogues des sources,
etc ...
et ceci d'autant plus que
plusieurs autorités se partagent les compétences de gestion
d'une ressource commune ou que l'organisation administrative est
plus déconcentrée ou décentralisée à des échelons
géographiques multiples, notamment dans les pays ayant un
territoire très vaste.
41. La définition de normes et de
standards communs entre producteurs de données et gestionnaires
de bases reste encore largement à faire.
42. On pourrait multiplier les
exemples pour illustrer ce manque d'homogénéité considérable
dans les informations relatives aux demandes en eau ou aux rejets
: le résultat en est que les analyses sur l'adéquation entre
l'offre et la demande sont très difficiles à établir à
l'échelle du terrain, d'un bassin ou d'un pays et que celles-ci
sont encore plus difficilement comparables entre différents
pays.
- I.3 - Linformation
nest pas facilement accessible, ni utilisable :
43.Au-delà des problèmes de
dispersion et de qualité qui viennent dêtre évoqués, il
faut également être conscient de ce que les données, quand
elles existent, sont généralement très difficilement
accessibles.
44. Cette notion
daccessibilité est devenue, en très peu de temps, tout à
fait fondamentale dans le contexte dune véritable et
profonde révolution en matière de communication et de
circulation de linformation à léchelle mondiale.
45. Il a généralement été
constaté, en se référant aux conclusions des évaluations
récentes de systèmes de collecte, que les retards entre la
collecte sur le terrain et le traitement primaire des données
étaient de lordre de plusieurs mois et, parfois de
plusieurs années, alors que selon les techniques actuelles, ce
délai pourrait nêtre laffaire, au pire, que de
quelques jours.
46. Lorsque les données existent,
elles sont souvent codées dans des formats
" propriétaires ", ce qui ne permet pas
simplement les échanges avec les autres systèmes
dinformation et les utilisateurs.
47. Lutilisateur doit
généralement se déplacer pour obtenir les données : il
nexiste dailleurs que rarement la possibilité
daccéder à distance à un catalogue des informations
disponibles et lextraction des données selon une requête
particulière de lutilisateur, lorsqu'elle est possible,
est peu conviviale et nécessite lintervention de
l'informaticien gestionnaire des bases de données.
48. Beaucoup de pays nont
pas encore de liaison à haut débit vers le réseau Internet et,
lorsque cest le cas, les administrations concernées ne
sont pas toujours elles-mêmes reliées à un serveur
daccès, voire même tout simplement informatisées.
49. Fréquemment, les capacités
des personnels et les moyens informatiques disponibles, quand il
y en a, sont encore trop limités ou défaillants : un
effort considérable déquipement approprié et surtout de
formation professionnelle de toutes les catégories de personnels
est indispensable.
50. Il est particulièrement
important que linformation soit fournie, en temps réel ou
différé, selon le cas, sous les formes utiles à chaque type de
fonctions nécessaires à la gestion de leau et, cela, à
tous les niveaux dintervention nécessaires :
- services locaux ou
particuliers (irrigants, industriels ...),
- bassins versants,
- administrations gouvernementales, nationales ou
fédérales,
- institutions internationales éventuelles.
Les récents progrès en matière
de technologie de bases de données partagées et de
communications permettent de concevoir ces systèmes
dinformations sans quil y ait nécessairement
concentration physique des données sur un site particulier.
Toutefois, des procédures dhomogénéité doivent être
définies et appliquées, ce qui implique nécessairement une
coordination en matière de méthodes, de formation et
déquipements.
51. Les bulletins de prévisions
météorologiques, qui sont largement diffusés dans pratiquement
tous les pays de la planète par voies de radio, de télévision
ou de journaux, devraient comporter une composante plus
spécifique et plus explicite pour la prévision des
précipitations, en particulier dans les zones où les ressources
pluviales restent déterminantes pour lagriculture ou
lélevage. Dans la plupart des régions, ceci implique
daméliorer substantiellement cette capacité de
prévision, ce qui requiert des progrès en matière
dobservation des phénomènes climatiques (réseaux de
mesure au sol, satellites) et en matière de connaissance de la
circulation des masses dair (progrès en sciences
météorologiques) ainsi que lorganisation des services
davertissement auprès des agriculteurs.
52. Il est clair en outre que,
compte tenu du caractère " sensible " de
certaines informations, tant en ce qui concerne, ici, la
localisation ou la quantité de la ressource, que, là, le niveau
de pollution ou de dégradation de lenvironnement,
laccès " public " à des données
fiables nest pas toujours facilité.
- I.4 - LES
MOYENS NECESSAIRES A LA MOBILISATION DES
INFORMATIONS SONT ENCORE GENERALEMENT INSUFFISANTS :
53. La mobilisation des
informations, qui nécessite donc une organisation cohérente des
réseaux de mesures, des laboratoires danalyse, de la
transmission des données, de leur vérification et de leur
contrôle, de la gestion des banques de données, de leur mode
daccès et de leurs " produits ",
suppose des moyens dinvestissement et de fonctionnement
pour garantir lefficacité et la permanence dun
système dinformation intégré, dont il faut
sassurer de loptimisation, afin de disposer, pour le
moindre coût, de toutes les informations nécessaires, tout en
sachant se limiter à celles qui sont vraiment utiles.
54. Il faut se rappeler, en
particulier, que, si les frais dinvestissements sont
élevés pour disposer dune information appropriée
(stations, laboratoires, télétransmission, informatique ...), la
qualification des spécialistes qui interviennent (formation) et
les frais de fonctionnement et dexploitation sont, de très
loin et sur le moyen et long terme, les postes de dépenses les
plus importants et récurrents. Un pays comme la FRANCE, par
exemple, doit consacrer plus de 200 millions de FF par an au
fonctionnement de son système dinformation sur leau,
répartis entre les différents opérateurs qui y sont
impliqués : il sagit dun poste budgétaire
particulièrement lourd.
55. De ce point de vue, les
nouvelles technologies ne peuvent jamais se substituer à une
organisation réfléchie, disposant de moyens adéquats et
notamment déquipes pluridisciplinaires compétentes. Les
systèmes dinformation ne fonctionnent que sil y a
des hommes compétents qui en sont responsables ; les
liaisons satellites, les modèles, les analyseurs automatiques,
etc ... ne sont là que pour faciliter la tâche des services,
non pour les remplacer...
56. Il serait logique de penser
quavec la montée des préoccupations vis-à-vis du secteur
eau depuis de nombreuses années, la collecte et la gestion des
données se soient trouvées renforcées. En fait, tel nest
généralement pas le cas, surtout dans les pays en
développement. Des évaluations exhaustives au niveau
continental, tel le programme d" Evaluation des
Ressources en Eau en Afrique Sub-Saharienne ", mené
sous les auspices dorganisations internationales et de
plusieurs bailleurs de fonds internationaux et bilatéraux, ont
conclu à une dégradation très sensible du nombre et de la
qualité des données collectées à partir du début de la
décennie 80.
57. Plus précisément,
lactivité de beaucoup d'agences chargées de la collecte
de ces données, qui relèvent pratiquement toujours du secteur
public, montre un profil en dents de scie où alternent des
périodes fastes, qui correspondent à des programmes
dassistance internationale et des périodes de grandes
difficultés, liées le plus souvent à la faiblesse des moyens
pérennes de fonctionnement.
I.5 - DES INITIATIVES
DAVENIR ONT ETE LANCEES DERNIEREMENT :
58. Il convient de citer ici
l'initiative inspirée par l'Organisation Météorologique
Mondiale (OMM), "whycos" (World
HYdrological Cycle Observing
System) : qui vise à améliorer très
significativement la précision et la continuité des mesures de
terrain, en faisant le cas échéant appel à des technologies
avancées et dont lobjectif ultime est la mise en place de
bases d'informations régionales. Un certain nombre de programmes
whycos régionaux sont en cours ou en phase de qualification
(Méditerranée, Afrique Australe, Afrique de l'Ouest et
Centrale, Afrique Equatoriale, Région Caraïbes, etc.),
59. Le programme "FRIEND"
(Flow Regimes from International Experimental
and Network Data), organisé dans le cadre du Programme
Hydrologique International (P.H.I.) de l'UNESCO, traite des
principaux thèmes concernant les régimes hydrologiques des
rivières abordés selon les méthodes régionales : bases de
données, apports, étiages, crues, fortes pluies, mais aussi
processus physiques d'écoulement, tendances, hydrologie de la
gestion intégrée des eaux.
60. Dans le cadre de ce Programme
Hydrologique International (PHI) de l'UNESCO, un groupe de
travail commun de l'UNESCO et de l'OMM a également été
constitué pour évoquer la gestion de la circulation des
données hydrologiques.
61. On peut citer encore le
programme Global Environment Monitoring System
GEMS "Waters" conduit sous l'égide du PNUE, en
liaison avec lOMS.
62. Le programme AQUASTAT de la
FAO constitue une initiative marquante, aussi bien en termes
de pertinence aux échelles nationales qu'en capacité à fournir
des estimations plus globalisantes sur lusage agricole de
leau.
63. Parmi les projets régionaux
en matière de collaboration inter-Etats pour la constitution de
nouveaux systèmes d'informations, il faut citer le "SEMIDE"
(Système Euro-Méditerranéen d'Informations
dans le domaine de l'eau) dont la mise en
uvre a été décidée lors de la Conférence, qui a réuni
à Naples (Italie) les 9 et 10 décembre derniers, les directeurs
de l'eau des 27 Pays signataires de l'Accord de Barcelone et la
Commission Européenne.
64. Les travaux conduits depuis 3
ans dans le cadre du Centre Thématique "eaux
continentales " de l'Agence Européenne de l'Environnement,
ont également permis de définir les conditions de la
création d'un futur Réseau Européen de l'Eau (EUROWATERNET),
qui permettra, à terme, de réunir l'information utile pour
dresser l'état de l'environnement dans ce secteur pour les
quinze Etats-membres de l'Union Européenne, la Norvège et les
nouveaux Pays candidats à adhésion communautaire en Europe
Centrale et Orientale.
65. Avec le soutien du Programme
Européen DGXIII - TEDIS, une recherche a également été
réalisée sur l'échange informatisé de données sur l'eau
entre grands opérateurs du secteur.
66. En France, par exemple le Réseau
National des Données sur l'Eau (RNDE),
qui s'appuie sur le Secrétariat d'Administration National
des Données sur les Ressources en Eau (SANDRE)
et a permis la création d'un système interbancaire d'échanges
généralisés de données, sous l'appellation de Banque Nationale
des Données sur l'Eau (BNDE), mettant en
inter-relations, tant au niveau national qu'à celui de chacun
des 6 bassins, la douzaine de banques de données
préexistantes spécialisées ou thématiques préexistantes.
67. D'autres projets intégrateurs
de ce type existent, ou sont en cours d'étude, à des niveaux
fédéraux ou nationaux, comme par exemple au Brésil avec la
création d'un Système National des Données sur les Ressources
hydriques, ou au niveau de grands bassins versants, comme
l'observatoire de la qualité des eaux de la Vistule en Pologne
et de son affluent le Bug, commun avec la Bielo-Russie et
l'Ukraine, ou l'observatoire de l'environnement dans la Vallée
du fleuve Sénégal, partagée entre la Mauritanie, le Sénégal
et le Mali, etc ...
68. Des projets
"d'observatoires de Bassin" sont également en cours
d'étude ou en projet en Inde (Sabarmati-River), au Mexique
(PROMMA) ou en Turquie (fleuves Egéens - Baie d'Izmir) par
exemple...
69. Bien entendu, des échanges
harmonisés de données sont depuis longtemps organisés au
sein des Commissions Internationales, mises en place pour la
Protection du Lac Léman (CIPEL franco-Suisse) ou des eaux du
Rhin, de la Meuse et de l'Escaut (Allemagne, Belgique, France,
Hollande), notamment ...
*
- ANNEXE
1 -
Il y aurait plus de
1 300 millions de km3 d'eau sur notre
planète, ...dont les eaux salées constituent 97%. Le stock
des eaux douces est estimé à 35 millions de km3.
En fonction de leur mode de stockage, celles-ci se répartissent
de la manière suivante (Tableau 1) :
Tableau 1 :
répartition des stocks d'eau douce sur la terre (1).
Nature du
stock
|
% du stock
des eaux douces
|
Détail
|
% du stock
des eaux douces
|
Glaces
et neiges |
69,600 |
Antarctique
Groenland
Arctique
Autres (montagnes, permafrost) |
61,70
6,68
0,24
0,98 |
Eaux
souterraines |
30,150 |
nappes
phréatiques et profondes
eau du sol |
30,10
0,05 |
Lacs
et marais |
0,290 |
|
|
Eau
atmosphérique |
0,040 |
|
|
Rivières |
0,006 |
|
|
Ces chiffres montrent sans
ambiguïté que les volumes d'eau liquide "visibles"
constituent une proportion infime dans ce stock, et que la
majeure partie de l'eau douce est stockée sous forme de glace
sur les surfaces continentales de l'Antarctique et du Groenland.
Les eaux souterraines forment le deuxième gisement en
importance. Le stock moyen d'eau dans le lit des rivières est
dérisoire, tandis que les eaux de l'ensemble des lacs et marais
représentent seulement 0,3% du total.
__________
(1) : Shiklomanov,
I.A. (ed.), 1996. Evaluation des ressources et des
disponibilités en eau dans le monde. State Hydrological
Institute. St. Petersbourg. Document technique annexe à "Evaluation
exhaustive des eaux douces de la planète". Rapport du
Secrétaire Général à la cinquième session de la Commission
du Développement Durable des Nations Unies. New York, avril
1997, 64 pp.
La répartition des flux par
continents (Tableau 2), montre une grande diversité
hydrologique : en termes de volumes écoulés, l'Asie est le
premier producteur d'eau douce aux océans, suivi par l'Amérique
du Sud (colonne 2). Par contre si l'on convertit ces volumes
en mm équivalents répartis sur chaque continent
(colonne 4), on constate que l'Amérique du Sud avec
661 mm d'écoulement par an est un continent
hydrologiquement deux fois plus actif que l'Asie (332 mm).
Ceci s'explique très largement par le gigantisme du système
hydrologique du Fleuve Amazone qui contribue à lui seul pour
près de 7 000 km3, soit 15 % de
l'écoulement global et par l'endoréisme développé en Asie.
Tableau 2 :
Contribution des continents aux flux d'eaux douces (2)
Territoire
|
flux annuel (en km3)
|
% de l'écoulement mondial
|
|
flux annuel (en mm)
|
Asie |
14 410
|
31
|
|
332
|
Amérique
Sud |
11 760
|
25
|
|
661
|
Amérique
Nord et Centre |
8 200
|
17
|
|
339
|
Afrique |
4 570
|
10
|
|
151
|
Europe |
3 210
|
7
|
|
306
|
Antarctique |
2 230
|
5
|
|
160
|
Océanie |
2 040
|
4
|
|
1 610
|
Australie |
348
|
1
|
|
45
|
Total
terres émergées |
46 770
|
100
|
|
314
|
(1) : Shiklomanov
I. (1993) World Freshwater Ressources. In "Water in
Crisis", P. Gleick ed., Chapter. 2, pp 1-24, Oxford
University Press.
- ANNEXE
2 -
Ressources en eau douce naturelles
et renouvelables dans le monde (flux moyens) réparties par
espaces géopolitiques (groupes de pays).
Chiffrages actualisés en
priorité d'après les évaluations nationales les plus
récentes, complétées par des compilations internationales
(notamment Shiklomanov, UNESCO, 1996 et FAO 1995,1997). Ils sont
un peu supérieurs à ceux publiés antérieurement.
Espaces géographiques
(groupes de pays)
|
Ressources intérieures
moyennes en km3/an*
|
Ressources d'origine extérieure au
groupe de pays en km3/an
|
Part relativement régulière
(superficielle et souterraine)
en km3/an
|
Proportion disponible actuelle
compte tenu des prélèvements bruts en %
|
Europe
de l'Ouest, nordique et méditerranéenne (Union
Européenne + A.E.L.E. et Chypre) |
1750 |
20 |
600 |
85 |
Europe
de l'Est (avec Russie d'Asie) |
4720 |
290 |
1200 |
94,5 |
Amérique
du Nord (U.S.A. et Canada) |
6750 |
0 |
1800 |
92,5 |
Amérique
Centrale (avec Caraïbes) |
1200 |
3 |
700 |
90 |
Amérique
du Sud |
11740 |
0 |
3500 |
98,7 |
Monde
Arabe, Afrique du Nord (avec Soudan), Proche et Moyen
Orient (avec Israël) |
140 |
190 |
100 |
30 |
Afrique
au Sud du Sahara (avec Madagascar) |
3910 |
0 |
1400 |
98,5 |
Asie
Centrale et Occidentale (avec Turquie, Transcaucasie et
Iran) |
660 |
27 |
200 |
53 |
Sous-continent
indien et Asie du Sud-Est |
7700 |
1000 |
1800 |
87,5 |
Chine
(avec Mongolie et Corée du Nord) |
2900 |
0 |
1000 |
82 |
Japon
et "dragons" |
590 |
0 |
200 |
76 |
Australasie
et Océanie |
1690 |
0 |
500 |
98 |
Monde
entier |
43750 |
- |
13000 |
92 |
* dont une partie peut être
commune à plusieurs pays du groupe et une partie peut être
apportée à un groupe voisin.
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