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NanoRESP : les nanotechnologies peuvent-elles devenir responsables ?



Dorothée Benoit Browaeys, le 05 Mars 2013


VivAgora lance cette année un nouveau forum destiné à accélérer le partage des informations relatives aux nanotechnologies, notamment aux nanomatériaux. Car c’est le cloisonnement et l’opacité qui règnent actuellement, en dépit des évolutions règlementaires récentes. Le forum NanoRESP veut ouvrir le dialogue pour accroître la transparence directe entre parties prenantes et ainsi contribuer à éclairer leurs choix.

Aujourd’hui, les professionnels du bâtiment utilisent des matériaux dont ils ne connaissent pas la composition exacte ni les risques techniques, sanitaires ou environnementaux qui leur sont éventuellement associés. C’est un entrepreneur et administrateur de l’Office général du bâtiment et des travaux publics (OGBTP) – association loi 1901 issue de la Fédération française du bâtiment et de l’UNSFA, syndicat des architectes –, Jean-Pierre Anquetil, qui établit ce constat fort peu connu du grand public.

Il résume l’inconfort de nombre d’opérateurs face au manque d’informations relatives aux nanomatériaux présents dans les produits qu’ils utilisent : en l’occurrence ici, peintures, enduits, ciments, verres, etc. Il n’est pas sûr que la déclaration des usages et des quantités des « substances à l’état nanoparticulaire » que les fabricants, distributeurs ou importateurs doivent effectuer depuis le 1er janvier réduise notablement cette incertitude.

Le manque de transparence ainsi pointé du doigt est une des raisons de la mobilisation de VivAgora dans ce domaine depuis huit ans, avec la réalisation de plusieurs débats et processus de dialogue (Nanomonde, Nanoviv, CoexNano, ACEN, NanoForum, dialogues citoyens-entreprises, Open-innovation) et de dizaines d’articles. Aujourd’hui, l’association poursuit ce travail d’information-concertation en mettant en place une alliance associant des acteurs publics et privés pour financer le « Forum NanoRESP », qui marque l’ambition de nourrir la prise de responsabilité des acteurs sur le terrain des nanotechnologies et des nanomatériaux. Pour l’heure, le CNAM, la Fédération française du bâtiment et le groupe de chimie BASF ont annoncé leur soutien, tandis qu’une quinzaine d’autres organisations, entreprises et pouvoirs publics ont manifesté leur intérêt.


Innover par le dialogue

Le constat est simple : ni la réglementation, ni la normalisation ne suffiront à encourager des innovations nanotechnologiques responsables, c’est-à-dire cherchant à être à la fois utiles et sans impacts sanitaires et environnementaux ; elles ne suffiront pas davantage à rassurer les citoyens, confrontés à un risque diffus. Parce que les nanotechnologies, et notamment les nanomatériaux, placent la société dans des situations nouvelles (matériaux innovants et complexes, présence dans quantité d’objets du quotidien, risques sanitaires et environnementaux, incertitudes scientifiques, formations éclatées et non hiérarchisées, cloisonnement des acteurs et des informations…), il s’agit d’innover en créant un dialogue entre détenteurs d’informations et d’expertises techniques, et tous les utilisateurs actuels ou potentiels de ces technologies.

L’idée est donc de co-construire un forum sur le modèle ouvert du Nanoforum organisé au CNAM de 2007 à 2009, et qui a consacré onze rencontres à des thèmes divers tels que nanociments, nanocosmétiques, nano-alimentation, ou nanoargent.

Par leur caractère diffus, transversal et touchant la plupart des applications de la vie quotidienne, les nanotechnologies constituent un champ stratégique pour tester et mettre en œuvre des pratiques d’innovation responsable. Il s’agit de faire en sorte que toute innovation puise être valorisée pour ses bénéfices, avec le souci de l’équité, tout en respectant les principes économiques, humains et environnementaux du développement durable. Ces pratiques consistent en somme à intégrer de manière volontaire les « valeurs sociétales et environnementales » dans les inventions, puis dans les innovations.


L’intelligence est dans la conception

En France, au sein de la commission X457 d’AFNOR Group, qui travaille en lien avec le Comité européen de normalisation et son comité technique CEN/TC 352, ainsi qu’avec le comité TC 229 de l’organisation internationale de normalisation (ISO), cette approche nouvelle stimule les acteurs de l’innovation nanotechnologique. Cependant, les producteurs et tous les intermédiaires restent confrontés à de nombreuses incertitudes tant en matière de définition des nanotechnologies et des nanomatériaux, de régulation politique et de règlementation (nationales, internationales, sectorielles ou transversales), que de risques (techniques, sanitaires, environnementaux, financiers, sociaux ou éthiques). Ces instances de normalisation sont donc en train d’établir un guide d’aide à la décision responsable en contexte d’incertitude, en vue de la mise sur le marché.

Le Forum NanoRESP peut contribuer à traduire en pratiques les exigences de la future norme « nanoresponsable ». En effet, les entreprises porteuses d’innovations peuvent y partager connaissances et analyses avec les acteurs associatifs, les chercheurs académiques et les pouvoirs publics. Le Nanoforum du CNAM l’a montré, ce partage selon un mode transversal abordant à la fois les questions de performance et de pertinence des produits, de risques, de réglementation, de mise ou de non-mise sur le marché, d’information et d’étiquetage, peut faire gagner du temps à tous les acteurs et les responsabiliser. C’est aussi un enjeu de robustesse des innovations, une manière d’anticiper les risques économiques découlant de la mauvaise réputation ou du développement d’un produit.


NanoRESP en pratique

Un cahier des charges a été établi pour réaliser le Forum NanoRESP. Le Comité d’organisation comprendra une personnalité reconnue, un garant veillant au respect du processus et de ses principes (pluralité, tolérance, transparence, liberté de parole, ouverture scientifique, pérennité), et des représentants du monde académique, associatif, industriel et des pouvoirs publics.

Chaque année, trois séances accueilleront chacune 80 à 120 personnes. Elles aborderont des questions telles que :
  • l’approvisionnement en ressources ;
  • le coût environnemental des productions : empreinte carbone, coût en énergie, coûts écologiques ;
  • les risques sanitaires : exposition des travailleurs, des utilisateurs et des consommateurs ;
  • les risques environnementaux ;
  • l’information des entreprises clientes, des consommateurs, des pouvoirs publics ;
  • le cycle de vie des produits : déchets, recyclage, écoconception, économie circulaire ;
  • la mise sur le marché et l’évolution des réglementations l’encadrant.
L’accent sera mis sur la gestion concrète des incertitudes afin de constituer un « démonstateur » de l’application de la norme « nanoresponsable » en cours d'élaboration.



Un écosystème de confiance

Ne sommes-nous pas présomptueux en affirmant qu’un tel partage est possible ? Nous ne le croyons pas. L’expérience du Nanoforum a permis de valider, au cours de onze séances, un processus capable d’élaborer une « culture commune » sur le thème des nanotechnologies, c’est-à-dire des repères, des connaissances, des inconnues, et des dilemmes. Ce partage, réalisé sur des cas concrets, constitue une modalité efficace de « vigilance coopérative » capable en outre de créer un « écosystème » de confiance [D. Benoit Browaeys, La place de la société civile dans les processus d’expertise, Revue Experts, n°100, février 2012.].

Non que les acteurs puissent se faire totalement confiance sur des sujets aussi complexes et controversés. Mais il est apparu que les participants considèrent l’espace de dialogue ainsi conçu, du fait du contrat moral tacite lié à l’équilibre des forces, incarné par ses pilotes, comme suffisamment impartial pour que les expressions des uns et des autres soient respectées et voulues comme modalité d’apprentissage et d’anticipation. Ce « cadre de confiance » est un passage obligé pour favoriser la transparence, l’expertise pluraliste – c’est-à-dire alimentée par des sources d’informations et de compétences diverses –, l’explicitation des risques, des conflits d’intérêt ou de valeur, et la crédibilité de choix durables.

Dans la théorie de la responsabilité sociale des entreprises (RSE), l’association des acteurs en amont de l’innovation est vue de longue date comme une des dynamiques les plus fécondes pour insérer durablement les entreprises dans leur contexte social et renouveler ainsi leur image « citoyenne ». Cette stratégie managériale se double aujourd’hui d’une forte demande sociale, appréhendée par les pouvoirs publics.


Répondre à la demande sociale

Ainsi, dans sa réponse au débat national sur les nanotechnologies mené en 2009-2010, le gouvernement français a souligné la « forte demande d’association de la société civile à la gouvernance et aux grandes orientations en matière de développement et de régulation des nanotechnologies, intégrant dialogue et transparence sur les finalités de la recherche et du développement technologique », et appelle à une réflexion sur « les modalités et les champs de travail envisageables pour une association durable des acteurs de la société civile à la gouvernance dans [le] domaine [des nanotechnologies] » [Communiqué interministériel « Engagements du Gouvernement sur les suites à apporter au débat public relatif au développement et à la régulation des nanotechnologies », 27 octobre 2011, rendu public le 23 février 2012.]. Le Conseil d’analyse stratégique a souligné, dans son rapport sur les nanotechnologies de 2011, les qualités du Nanoforum – il « favorise notamment la création de partenariats territoriaux, et contribue à la structuration de la société civile, indispensable au débat » – et recommande de poursuivre ce type de dialogue (proposition 3) [Pour un développement responsable des nanotechnologies, Note d'analyse 248, novembre 2011.].

Au plan européen, les exigences en matière de recherche et d’innovation responsables (RRI) se font de plus en plus explicites ([Options for Strengthening Responsible Research and Innovation, Report of the Expert Group on the State of Art in Europe on Responsible Research and Innovation, Directorate-General for Research and Innovation, Science in Society, 2013. A report on Responsible Research & Innovation, Hilary Sutcliffe, Director, MATTER, On the basis of material provided by the Services of the European Commission. Prepared for DG Research and Innovation, European Commission, 2012.]. Or, en situation d’incertitudes, le dialogue des parties prenantes peut accompagner tous les acteurs et les aider à franchir des étapes qui participent à des formes d’innovation responsable. C’est à quoi va s’employer le Nanoforum nouvelle formule.



Dorothée Benoit Browaeys, VivAgora



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