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FRANCE : communiqué de presse du Ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement
Date : 11 juillet 2000

Logo Ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Cliquez sur le logo pour rejoindre le site.Discours de Mme la Ministre, Colloque sur l’épandage des boues d’épuration urbaine
le 5 juillet 2000

 

Mesdames et Messieurs les Parlementaires, Mesdames et Messieurs,

Je tiens tout d’abord à remercier Daniel Marcovitch, Dominique Jourdain, Hydrosphère et les Eco-Maires d’avoir organisé ce colloque aujourd’hui qui je crois, était nécessaire. La présence de trois membres du Gouvernement montre en effet à quel point il était essentiel que chacun puisse venir ici échanger et débattre sur la question de l’épandage agricole des boues d’épuration.

Nous sommes tous des pollueurs ! Nous produisons tous des eaux usées qui, si elles étaient directement déversées au milieu naturel, conduiraient à la mort l’ensemble de nos rivières, rendraient impropres à la consommation humaine la grande majorité de nos ressources en eau et empêcheraient de se baigner sur bon nombre de plages. Les eaux usées doivent donc être traitées, assainies, pour que leur rejet au milieu après traitement soit compatible avec les différents usages de l’eau et la préservation du milieu aquatique.

Dans les secteurs d’habitat dispersé, c’est-à-dire une bonne partie du monde rural, les techniques d’assainissement non collectif permettent d’assurer un bon assainissement. Dans les zones d’habitat groupé, à l’inverse, l’assainissement collectif s’impose et les effluents doivent être collectés et traités dans des stations d’épuration. Les textes communautaires ont d’ailleurs considérablement renforcé et précisé les exigences en matière d’assainissement urbain, en particulier par une directive de 1992.

Ces stations d’épuration, indispensables à la lutte contre la pollution et la préservation de l’environnement, produisent systématiquement des boues, dont il faut donc définir la destination la plus pertinente. Ces boues d’épuration urbaine sont essentiellement constituées de matière organique et fertilisante, c’est pourquoi leur recyclage par épandage agricole s’est traditionnellement imposé comme un mode de valorisation adapté. 65 % des boues urbaines sont ainsi à l’heure actuelle épandues en France sur les terrains agricoles. De nombreux autres pays ont fait le même choix : la valorisation agricole des boues représente ainsi 55 % des boues aux Etats-Unis, 45 % au Royaume Uni, 40 % en Allemagne, et 70 % au Danemark. Seuls les pays où les terres agricoles sont rares et soumises à de très fortes pressions renoncent à un tel épandage, à l’instar des Pays-Bas.

Ce mode de valorisation est économique et environnementalement pertinent. D’une part il est moins coûteux que la création d’incinérateurs pour brûler les boues, et cet argument n’est pas négligeable quand on considère que c’est en définitive sur le prix de l’eau et donc sur chaque consommateur d’eau que pèserait tout surcoût en la matière.

D’autre part, il est plus intelligent d’utiliser des matières fertilisantes pour faire pousser des plantes plutôt que de les mettre en décharge ou de les brûler dans des incinérateurs dont l’impact environnemental ne serait d’ailleurs pas forcément négligeable, et dont la création se heurterait selon toute vraisemblance à l’hostilité des riverains.

La poursuite de cet épandage sur les terrains agricoles s’est toutefois heurtée ces derniers temps à de fortes résistances. D’une part, des craintes se sont exprimées sur le risque sanitaire éventuel qu’impliquerait ce type de pratique. On connaît l’extrême sensibilité de l’opinion à tous ce qui pourrait d’une manière ou d’une autre porter atteinte à la sécurité sanitaire et à la qualité des aliments. Plus de 30.000 personnes étaient ainsi encore rassemblées à Millau ce week end pour dire " Stop à la malbouffe ", et je ne rappellerai pas les inquiétudes considérables provoquées par la crise de la vache folle ou l’épisode de contamination de poulets belges par la Dioxine.

Ces préoccupations du consommateur sont parfaitement légitimes. Il incombe donc aux pouvoirs publics de garantir que la valorisation agricole des boues d’épuration urbaine n’implique pas de risque sanitaire ni de perte de qualité des produits alimentaires. Dans ce but, mon ministère a profondément rénové et renforcé l’encadrement réglementaire de l’épandage agricole de ces boues. Un décret de décembre 1997 et un arrêté de janvier 1998 définissent ainsi des règles claires et strictes en la matière : valeurs plafonds en éléments métalliques, modalités d’épandage, modalités d’analyse et de contrôle..., tout est précisé pour garantir cette sécurité sanitaire. Les éléments en ma possession, dont la teneur a d’ailleurs été rappelée aujourd’hui, démontrent alors que si ces règles sont respectées, le risque est infime et la qualité des produits absolument pas modifiée.

Les agriculteurs ont toutefois exprimé des inquiétudes d’ordre plus général. L’impact de l’épandage des boues d’épuration sur les terres agricoles est cependant à relativiser : les épandre toutes sur des surfaces agricoles ne mobiliserait dans notre pays que 2,5 % de la Surface Agricole Utile (SAU), et les boues ne représentent en France que 2 % des apports en azote et en phophore (contre 35 % pour les effluents d’élevage et 63 % pour les engrais minéraux).

Toutefois, les agriculteurs disent à juste titre qu'en acceptant d’épandre ces boues sur leurs champs, ils rendent un service à la société et particulièrement aux habitants des villes productrices de boues. Ils souhaitent que ce service soit reconnu et qu’en tout état de cause il ne leur provoque pas d’ennuis. Ils ont donc demandé qu’en sus des garanties réglementaires visant à l’innocuité de l’épandage, tout soit fait pour éviter que les agriculteurs qui épandent des boues soient pénalisés : ils ne doivent l’être ni pour la commercialisation de leurs produits, ni évidemment a fortiori par une quelconque perte de valeur de leur outil de production.

Il nous est donc apparu nécessaire de procéder à une très large concertation avec l’ensemble des acteurs concernés et notamment la filière agro-alimentaire et la distribution pour apporter ces garanties aux agriculteurs qui ont ce réflexe citoyen de participer à un mode écologiquement responsable d’élimination d’un déchet produit par d’autres. Un comité national a ainsi été mis en place en 1998 en vue notamment aboutir à la définition d’un accord par lequel chacun des intervenants reconnaîtrait la pertinence de la valorisation agricole des boues d’épuration urbaine, lorsqu’elle est effectuée conformément aux règles en vigueur.

Et puis, comme malgré toutes les précautions prises, le risque nul n’existe dans aucune activité humaine, a été étudiée la création du dispositif le plus efficace possible pour assurer l’indemnisation des agriculteurs en cas de problème, pour que vraiment, en aucun cas, ils ne soient pénalisés.

Il me semble que maintenant, les conditions d’un tel accord national sont réunies, et la tonalité très positive du colloque d’aujourd’hui me le confirme. Le projet d’accord diffusé à l’ensemble des membres du comité national sur les boues prévoit en conséquence :

- la reconnaissance de principe de l’intérêt écologique et économique de l’épandage agricole des boues ;

- l’engagement de l’Etat de veiller à un respect strict de la réglementation en vigueur, par un effort de contrôle renforcé ; une certification des pratiques d’épandage pourrait utilement compléter et crédibiliser cet effort de contrôle et je remercie le Syndicat des Professionnels du Recyclage en Agriculture (SYPREA) d’avoir pris l’initiative d’en étudier les modalités ;

- le lancement d’un plan d’action en direction des collectivités productrices de boues pour les sensibiliser à la nécessité impérieuse de veiller à la qualité de celles-ci, ce qui passe notamment par une maîtrise croissante de rejets non domestiques dans les réseaux d’assainissement ;

- la poursuite et l’approfondissement de la recherche sur les boues pour améliorer les conditions d’utilisation des boues sur les sols agricoles et forestiers et pour les opérations de revégétalisation ;

- avec la collaboration de l’Association Nationale des Industries Agro-alimentaires (ANIA) et de la Fédération du Commerce et de la Distribution (FCD), la généralisation d’efforts d’information et de sensibilisation en direction des industriels de l’agro-alimentaire et des distributeurs pour éviter toute stratégie de marketing discriminatoire à l’encontre de l’épandage des boues ; je crois d’ailleurs que de telles stratégies ne seraient pas à terme payantes. Certes, les consommateurs accordent de plus en plus d’importance aux conditions de production des produits alimentaires et sont soucieux qu’elles respectent le mieux possible l’environnement. Mais leur garantir ce respect n’implique évidemment pas qu’on leur vende du vent, du pseudo environnement. Refuser le recours à l’épandage alors que cet épandage va dans le sens de l’environnement, c’est faire l’inverse de ce qu’on prétend faire, et ça risque de se retourner contre ceux qui veulent prouver qu’ils vendent des produits respectueux de l’environnement ;

- enfin, la création d’un dispositif d’assurances souscrites par les producteurs de boues couvrant les exploitants agricoles dans l’hypothèse d’éventuels dommages ; la solidité financière de ce dispositif assurantiel sera garantie par les assureurs par un dispositif de réassurance ; en outre, l’Etat s’engage à prendre en charge le pré-financement de tout dommage non couvert par ce dispositif assurantiel, à charge pour lui de se retourner vers le responsable du dommage.

Je souhaite que cet accord soit maintenant signé dans les toutes prochaines semaines.  Je vous propose en ce sens de me transmettre vos observations éventuelles sur le projet d’accord ; mes services sont prêts à assurer si nécessaire d’ultimes médiations pour que cet accord puisse être signé par tous à la rentrée. Je sais pouvoir compter sur le sens des responsabilités de chacun, qui s’est exprimé tout au long de cette journée, et sur votre capacité à tous à faire abstraction des égoïsmes catégoriels pour y parvenir dans les meilleurs délais et lever ainsi les blocages actuellement constatés sur le terrain.

Cet accord national une fois signé, il faudra l’appliquer et le faire vivre au niveau local. Des instructions seront données en ce sens aux préfets. Je suis convaincue qu’une fois les difficultés de principe nationales résolues au niveau national, grâce à l’importante concertation que le Gouvernement a conduite, les Préfets sauront aider les collectivités à trouver au cas par cas les modalités d’élimination de leurs boues les plus appropriées par un étroit partenariat avec en particulier les agriculteurs et les associations.

Ainsi, les crises et crispations actuelles pourraient n’être plus bientôt qu’un mauvais souvenir. Je compte sur vous pour oeuvrer en ce sens et vous remercie de votre attention.

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