CONFÉRENCE INTERNATIONALE
"EAU ET DÉVELOPPEMENT DURABLE"
Paris - 19/20/21 mars 1998 |
Documents de travail - Ateliers d'experts (III) - Gestion durable, Economie et financements -
III.1 Objectifs
de gestion globale et les fonctions a assurer
1. De tout temps,
laccès à leau ou à linverse la protection
contre ses méfaits (inondations) ont été des conditions de la
vie et du développement des activités et de forts ferments
dorganisation collective, politique et sociale.
2. Aujourdhui,
avec laugmentation des consommations de toutes natures, et
la pollution qui peut conduire à la
" stérilisation " de certaines ressources
pourtant disponibles en quantité, leau risque de devenir,
comme cest déjà le cas dans des pays arides, un facteur
limitant essentiel du développement économique et sociale dès
le début du siècle prochain.
3. Une gestion globale
et intégrée des ressources en eau est donc nécessaire.
4. Cette gestion
globale et intégrée de la ressource suppose qu'un ensemble de
fonctions soit assuré de façon complémentaire et cohérente,
en termes :
- d'administration
générale, de sécurité et de police,
- dorganisation de loccupation du
territoire,
- d'aménagements structurants,
- de protection de la ressource et des milieux,
- d'équipements individuels et collectifs, liés
directement à l'utilisation de l'eau pour les différents
besoins,
- d'exploitation, de maintenance et de management,
- de production et de gestion de données,
- de recherches et d'études,
- de formation professionnelle,
- déducation et de sensibilisation,
- etc ...
5. C'est bien cet
ensemble de fonctions qui doit être organisé de façon pérenne
dans des cadres institutionnels précis avec les moyens de leur
financement.
6. Les réformes
institutionnelles à envisager sont souvent importantes,
permettant notamment dassurer le règlement des conflits
dusages, qui ne manqueront pas de survenir, et
dorganiser une intervention cordonnée de tous les
organismes et usagers concernés, de réaliser les équipements
collectifs indispensables et leur gestion et de protéger les
ressources et les écosystèmes.
7. La mise en place de
systèmes modernes dinformation, indispensables à
lélaboration des politiques de leau et au suivi de
leur efficacité, suppose également une organisation appropriée
et des moyens pérennes.
8. Enfin, de gros
efforts de formation administrative et professionnelle, ainsi que
de sensibilisation des usagers et des populations sont partout
indispensables.
9. Si, bien gérer le
secteur constitue un préalable, la mobilisation des moyens
financiers importants, tant en investissements quen
fonctionnement, est un impératif.
III.2 LEAU :
UN BIEN NATUREL, SOCIAL ET ECONOMIQUE
10. Leau est un
bien naturel, dont la ressource est limitée dabord par
le climat et la capacité de rétention des sols et milieux
naturels et dont la qualité peut être gravement altérée par
les pollutions de tous ordres.
11. Leau a
toujours été également un bien social : elle fait partie
des " besoins essentiels " à la vie et à la
santé. Un consensus général se dégage pour ne jamais refuser
de leau à celui qui a soif, quels que soient son revenu et
son pouvoir dachat. Les moyens utilisés pour traduire ce
statut social privilégié de leau varient selon les pays,
où lon parle de "service essentiel",
"service public", "service universel",
"service dintérêt général", etc ... propres
aux traditions de chaque pays.
12. Leau,
ou plutôt les services qui lui sont liés, devient cependant
de plus en plus un bien économique, avec des coûts de
production ou de préservation, des valeurs dusage, des
coûts dopportunité, des demandes et des offres variant
avec leurs prix.
13. Leau
nest cependant pas un bien économique comme les autres.
Si son coût de transport est le même que celui du pétrole, son
prix de vente maximum ne dépasse, nulle part dans le Monde, le
trentième de celui du pétrole. Seuls les grands fleuves peuvent
le transporter à coût nul sur des milliers de kilomètres.
Lhomme ne le peut toujours pas et il ne pourra pas de
sitôt transporter les excédents de lAmazone dans les
zones arides du globe. Léconomie et la technique modernes
nont donc pu créer un marché mondial de leau, comme
elles sont en train de le faire pour tous les biens marchands et
pour les services de lénergie, des télécommunications,
les transports maritimes ou aériens.
IIII.3 DES
BESOINS DE FINANCEMENTS IMPORTANTS
14. Les
investissements dans le secteur de leau sont très
capitalistiques : la création de grands aménagements
à léchelle des bassins des fleuves, ou les transferts
inter-bassins, les grandes adductions, les installations de
traitement et dépuration, ainsi que les réseaux de
distribution, de drainage ou de collecte des eaux usées,
correspondent à des besoins importants de financement de premier
établissement, dont lamortissement réaliste nest
envisageable que sur une très longue période de temps de
plusieurs dizaines dannées.
15. Il faut aussi savoir
que ces frais dexploitation et de maintenance sont du même
ordre de grandeur que lamortissement technique et financier
des investissements, lorsquils sont convenablement assumés
dans le cadre dune gestion rationnelle.
16. Avec environ de 1%
du Produit Brut Mondial, soit près de US$ 300 milliards par an,
les montants payés chaque année par les divers usagers de
leau pour sa consommation et son épuration sont
significatifs.
17. Bien quils ne
représentent que de lordre de 10 % à 15 % des volumes
consommés, contre environ 70 % pour les utilisateurs agricoles,
les consommateurs urbains assurent lessentiel de ce chiffre
daffaires. Les consommateurs des zones rurales, des
industries isolées et de lagriculture irriguée ne paient
souvent que des prix ou des redevances faibles et, en tout cas,
qui ne représentent à ce jour quune part minoritaire des
recettes des services des eaux.
18. Dans beaucoup de
pays, les recettes venant des usagers des services ne suffisent
pas à couvrir lensemble des coûts, en particulier, ceux
liés à l'amortissement des investissements, et si les frais de
fonctionnement arrivent à être au moins partiellement couverts,
il est encore rare que ce soit le cas des provisions pour
renouvellement, ce qui pose dénormes problèmes de
durabilité des investissements réalisés.
19. La relative
constance du chiffre daffaires du secteur en pourcentage
des PIB soppose cependant aux très grandes inégalités
des coûts dapprovisionnement, tant en valeur absolue que
par rapport au PIB de chaque pays.
20. Avec la croissance
des populations, surtout urbaines, et des niveaux de vie, les
besoins risquent de croître fortement dans la plupart des pays
même si avec le comptage et la tarification la consommation
semble contrôlée pour certains usages dans les pays
industrialisés.
Mais, à travers les
prix et les redevances, ces besoins se traduiront en demandes
liées au budget des consommateurs, des organismes publics et des
bailleurs de fonds. Face à la montée dautres besoins des
ménages tels que lélectricité, les télécommunications,
les transports, léducation des enfants, etc ... et aux
utilisations plus efficientes des agents économiques, rien ne
prouve que les consommateurs, en tout cas les consommateurs
finaux, accepteront de payer un pourcentage sensiblement
supérieur à ce 1 % de leur Produit Brut ou de leur Revenu
Brut quils consacrent à leau.
21. Le potentiel de
hausse des charges est peut être plus important dans le domaine
de leau dirrigation ; mais, dans le contexte
douverture des marchés mondiaux assuré par lOMC, il
sera modéré par les effets délasticité des
consommations par rapport aux hausses de prix qui ne manqueront
pas de survenir.
22. Quoi quil en
soit, lEtat ne peut pas tout assumer et les financements
publics classiques ont atteint leurs limites.
23. La mise en place
des systèmes de financements reposant, beaucoup plus que par le
passé sur la participation et la solidarité des utilisateurs et
des usagers, devient partout une nécessité.
Et toutes les analyses
convergent pour constater que, sauf dans quelques cas
particuliers, les crédits à mobiliser dépassent de très
loin les possibilités de financement sur les budgets publics
nationaux ou territoriaux, ainsi que ceux de lAide publique
internationale au Développement, qui représentent seulement de
lordre de 10% des investissements réalisés dans le Monde.
- III.4 - VERS
UNE GESTION PLUS ECONOME
24. La période
précédente a été largement marquée par la prédominance des
actions visant principalement à accroître loffre
deau mise à disposition ;
25. Or, lévidence
des gaspillages devient de plus en plus claire :
- évaporation
sur les lacs-réservoirs et les canaux dirrigation,
- faible efficience de leau en agriculture
irriguée,
- pertes dans les réseaux de distribution deau
potable,
- comportement irresponsable de certains consommateurs,
- faible recyclage de leau industrielle.
... des possibilités
déconomies apparaissent considérables et sont en
quantité à léchelle de la croissance des besoins.
26. Dans le même temps,
linsuffisante formation professionnelle des agents,
principalement une mauvaise connaissance des modalités modernes
dune exploitation et dune maintenance rationnelle des
ouvrages, ne permet pas datteindre les capacités optimales
de rendement escomptées de ceux-ci, et se traduit par un
vieillissement accéléré rendant obligatoire de nouveaux
investissements onéreux de renouvellement anticipés.
27. Il est bien clair
que ce sont d'abord des attitudes, correspondant à une
méconnaissance des problèmes et de mauvaises pratiques, qu'il
faut corriger :
28. Certes,
l'information, la sensibilisation, l'éducation et la formation
sont indispensables et restent trop sous-estimées, et donc
doivent être renforcées de façon prioritaire,
29. Mais, l'incitation
financière est aussi un moyen très efficace : c'est
l'application du principe "pollueur-payeur", auquel il
faut ajouter divers systèmes "utilisateur-payeur".
30. La tarification des
services, quand elle a été mise en place de façon
proportionnelle aux usages ou aux pollutions, a aussi un effet
pédagogique rapide.
III.5 - DES
SYSTEMES DE FINANCEMENT ONT ETE MIS EN PLACE
· III.5.1) La
facturation des services collectifs :
Les
usagers :
31. - soit, ont un
accès facile à la ressource et engagent les frais
correspondant à titre individuel et en supportent les coûts. La
question se pose de plus en fréquemment de leur participation au
financement des actions et ouvrages collectifs
damélioration de la ressource,
32. - soit, n'ont pas
d'accès direct à la ressource et doivent alors passer par des
"prestataires de services collectifs" - publics ou
privés - qui leur facturent le prix de leurs prestations -
selon des pratiques industrielles et commerciales, qui couvrent
au moins partiellement les coûts de mise à disposition.
Les cas les plus
fréquents sont :
33. - l'adduction
d'eau potable, l'assainissement et l'épuration des eaux
usées domestiques ou industrielles, qui relèvent de
"services des eaux", assez généralement publics,
très rarement privatisés, mais de plus en plus fréquemment
confiés, par la collectivité organisatrice, en gestion
déléguée par contrat à des entreprises privées
spécialisées (affermage, concession, gérance, ...).
34. - l'irrigation
collective de grands périmètres, où l'amenée d'eau
brute est organisée par des
groupements/syndicats/coopératives d'irrigants ou par des
entreprises concessionnaires de droit public ou privé,
35. - le
transport par voie fluviale ou par canaux de navigation,
pour lequel le dragage du lit, la mise au gabarit, le passage
des écluses, etc ... sont généralement refacturés aux
transporteurs, au prorata du tonnage des marchandises
transportées ou du trafic de voyageurs.
36. De plus en plus,
ces "services collectifs" devront équilibrer
l'intégralité de leurs coûts d'investissement, de
renouvellement, d'exploitation et de gestion, le plus souvent sur
une base d'assiette de facturation proportionnelle au service
rendu (m3 consommé par exemple), au
besoin grâce à des systèmes de subvention, notamment pour
limiter le coût global d'investissement restant à leur charge.
Il est particulièrement
important de faire prendre conscience aux usagers que ce qui leur
est facturé, nest pas leau en tant que matière
première (encore que leau dans son site a une valeur
patrimoniale parfois très importante), mais une prestation de
service liée à son stockage, à son transport, à sa mise en
pression, à son traitement ou à son épuration.
· III.5.2) Les
autres types de financements specifiques :
37. Il existe dans
certains pays industrialisés, à côté des financements
budgétaires traditionnels, des systèmes de financements publics
spécifiques, qui ont été progressivement mis en place :
* III.5.2.1
- Des redevances perçues
spécifiquement sur les usages de l'eau, tels que les
prélèvements d'eau brute, pour la production
hydroélectrique, le refroidissement des centrales thermiques
ou pour l'industrie ou l'irrigation, l'utilisation de l'eau
potable et/ou sur les rejets d'eaux usées, dont leur produit
est affecté à des investissements ou des aides au bon
fonctionnement des installations, visant à améliorer la
ressource ou les services de l'eau, réduire les pollutions,
restaurer les milieux aquatiques, financer les études et les
réseaux d'acquisition de données nécessaires.
Il existe des exemples :
38. Soit de
systèmes nationaux, transitant par des comptes
budgétaires spéciaux et dont les crédits sont
réaffectés, soit directement, à des grands projets ou
programmes décidés de façon centralisée, soit, plus
généralement, répartis sous forme d'enveloppes
déconcentrées ou décentralisées, mises à la disposition
des administrations territoriales ou des collectivités
locales.
39. Soit de
systèmes territoriaux, organisés généralement
au niveau de Bassin Versant ; dans ce cas, les fonds
collectés sur les usages ou la pollution de l'eau dans le
bassin sont réaffectés à des projets pour améliorer la
ressource ou les usages dans le bassin lui-même.
40. Dans les exemples
"fonctionnels" existants, ce sont en général des
"Comités de Bassin" réunissant l'administration, les
Pouvoirs locaux et les usagers qui proposent les taux de ces
redevances, dont la collecte et la réaffectation transitent par
des Organismes Financiers de Bassin, ayant généralement un
statut public.
41. Ces redevances sont
destinées à financer des "Programmes d'Interventions
Prioritaires" (PIP) approuvés par le Comité de Bassin -
par période en général quinquennale - et visant à la
réalisation les objectifs, à plus long terme, de schémas
directeurs.
42. * III.5.2.2
- Des taxes, liées aux procédures
administratives d'autorisation de prélèvement, d'exploitation
de chutes ou d'extraction de matériaux/granulats, etc..., qui
relèvent, de façon plus générique, des principes fiscaux des
"droits d'enregistrement" (facturation du coût d'un
acte administratif) ou des "Concessions d'utilisation du
domaine public".
Ces taxes sont
versées au budget général des Etats ou des Collectivités
Locales.
*
43. D'une façon
générale, les principes de financements spécifiques sont assez
complexes et il convient de bien en faire l'analyse pour en
comprendre les spécificités et souvent les complémentarités,
afin de mettre en place des politiques modernes et en général
efficaces de financement de l'eau.
44. De toute façon, il
y a toujours quelqu'un qui paie que ce soit :
n L'usager, qui achète des
prestations de services qui lui sont rendues, sachant que ces
services peuvent être :
· directs : c'est
l'amenée d'eau potable au robinet, d'eau brute à l'usine ou
à la parcelle de l'irrigant, c'est le branchement au réseau
collectif d'assainissement ...etc.
L'usager paie alors
le prix du service des eaux, comme il paie son électricité,
son téléphone, son combustible, ses transports ou le
nettoyage ...
· indirects : c'est la
reforestation des hauts bassins versants, la protection
contre les inondations, la lutte contre la pollution amont ou
la création d'un barrage-réservoir ... indispensables et
parfois directement liés à la prestation de service, dont
le coût a été souvent dans le passé assumé par la
collectivité, mais dont aujourd'hui la prise en charge est
de plus en plus demandée aux usagers au titre des principes
:
- de
"solidarité de bassins et d'aquifères",
- de "l'internalisation des coûts
externes",
n Le contribuable, qui
paie son impôt au budget général
n Le contrevenant, qui
est condamné à une amende en cas de négligence ou de non
respect des lois, normes et règlements.
L'important est de
faire payer au "bon endroit" : c'est-à-dire que
celui qui, par son action, crée un impact négatif sur le cycle
de l'eau doit avoir intérêt à réduire les dysfonctionnements
qu'il produit pour avoir à moins payer.
III.6
- RENDRE PLANIFICATION ET MARCHÉS
coMPLEMENTAIRES
45. Au moins pour les
usages importants, les " Administrations de
lHydraulique " délivrent, un peu partout dans le
Monde, des autorisations administratives de prélèvement ou de
détournement des eaux (parfois appelées " concessions
dusage "), plus fréquemment sur les cours
deau de surface, de plus en plus également sur les eaux
souterraines.
46. Dans de plus en plus
de Pays, des " Autorisations de rejet " sont
ou peuvent être nécessaires pour le déversement des eaux
usées, avec ou sans obligations préalables dépuration.
47. Dans la plupart de
systèmes traditionnels dirrigation, notamment, se sont
instaurés des " droits deau ",
exprimés le plus souvent en temps daccès à un
pourcentage du débit disponible dune source ou dune
rivière. On peut également être
" propriétaire " dune source ou
dun puits ...
48. Tant quil
existe suffisamment deau disponible pour tous les usages,
ces " autorisations " peuvent nêtre
quun simple contrôle administratif sassurant
notamment que des " droits acquis "
antérieurement par des usagers daval ne seraient pas
lésés par de nouveaux prélèvements ou que des compensations
ont bien été négociées.
49. En période ou
situation permanente de pénurie, les systèmes traditionnels
peuvent conduire à ce que certains utilisateurs damont,
utilisant "leurs droits" puissent gaspiller une
ressource rare, alors quà laval celle-ci peut
manquer ... La somme de prélèvements mal contrôlés peut
également conduire à une surexploitation de la ressource.
50. La question de la
répartition de la rareté, entre des usages en croissance,
devient centrale, dautant que des notions de débits
réservés pour la protection des écosystèmes sur les cours
deau ou de débit maximal renouvelable ou déquilibre
des nappes sont progressivement introduites.
51. Les objectifs du
développement durable imposent donc une planification stable à
long terme. Il sagit à travers des plans à long terme, en
général des schémas directeurs daménagement et de
gestion au niveau des bassins hydrographiques et des
sous-bassins, de promouvoir une consommation de leau
écologiquement viable fondée sur la protection pérenne des
ressources disponibles. Ces plans à long terme doivent être les
supports des choix des grands investissements structurants de
mobilisations, transferts, protections et épurations des
ressources, qui peuvent alors être formalisés en Programmes
Prioritaires dInvestissement en général quinquennaux.
52. Par ailleurs
certains marchés existent et donnent déjà des signes précieux
sur les coûts dopportunité et les valeurs dusage de
leau : ventes et reventes deau au détail par le
secteur informel, ventes en containers et en bouteilles, ventes
en gros entre collectivités voisines, ventes deau
dirrigation, ventes ou location de droits deau entre
irrigants, etc. Ces marchés " gris ", plus
ou moins " souterrains ", méritent
dêtre progressivement formalisés, reconnus, rendus plus
transparents. Dans de nombreux pays, définir, enregistrer et
surtout rendre négociables les droits deau permettrait
déviter des usages économiquement aberrants.
Conjuguée avec des
quotas globaux de prélèvement des ressources, déterminés sur
la base des objectifs du développement durable, une telle
politique contribuerait sans doute à assurer un équilibre plus
rationnel entre lutilisation des eaux souterraines et celle
des eaux de surface. Bien des infrastructures lourdes visant à
transporter leau sur des centaines de kilomètres à des
coûts hors de proportion avec la solvabilité des usagers et les
capacités des finances publiques, en seraient évités ou du
moins différés et rendus plus difficiles à financer.
III.7 - SUBVENTIONS
ET PEREQUATIONS
· III.7.1) Des subventions
resteront necessaires a court terme
53. Lhistoire
économique démontre quaucun service deau potable,
dassainissement ou dirrigation de pays industriels
daujourdhui ne sest construit sans subventions
déquipement directes ou indirectes. De plus, la
construction des réseaux et équipements a été étalée sur
des périodes très longues. Aujourdhui la rentabilité
financière des immobilisations nettes de ces services est
sensiblement inférieure à 2 %, comme le démontrent des
analyses récentes. Il est vrai que, dans beaucoup de pays
émergents, le développement des marchés financiers permet
aujourdhui des financements commerciaux
dinvestissement à longues durées damortissement.
Ça ne sera pas le cas rapidement dans dautres pays, en
particulier les Pays les Moins Avancés (PMA).
54. Les subventions
budgétaires, ou leur équivalent sous forme de bonification
dintérêts demprunts, vont persister dans la plupart
des cas, au moins en période transitoire, même si le principe
de couverture de lensemble des coûts par les utilisateurs
doit constituer un objectif à long terme.
55. Dans de nombreux
pays industrialisés, beaucoup de services dadduction
deau potable étaient encore complètement gratuits dans
les années 1970 et même aujourdhui peu
dagriculteurs payent effectivement leau
dirrigation à son coût réel de mise à disposition.
Lapplication du principe pollueur-payeur aux pollutions
diffuses, agricoles ou non agricoles, doit être encouragée.
Elle doit favoriser les pratiques respectueuses de
lenvironnement et constituer une véritable incitation à
la réduction des sources de pollution sur le milieu naturel.
*
· III.7.2) Différents
types de perequations offrent des solutions variees
56. Une approche
industrielle et commerciale des services des eaux est compatible
avec des systèmes de péréquation permettant de moduler les
efforts financiers entre différentes catégories dusagers
si cela savère nécessaire, pour autant quelle
seffectue dans la transparence des coûts et des prix.
Il existe des
systèmes de :
a) Péréquation
" territoriale "
57. Le principe de
léquilibre des budgets et de la vérité des prix
supposerait quil y ait autant de prix de revient de
leau que de services collectifs de distribution. Mais il
existe des exemples de péréquation entre les services
dune même circonscription territoriale pour équilibrer
entre usagers le coût plus ou moins lourd quils auraient
pour laccès aux ressources ou pour réaliser leur
dépollution.
b) Péréquation
intersectorielle
58. Il existe des
sociétés municipales de services polyvalents qui organisent une
péréquation entre services rentables ou non, tels que
lélectricité, le chauffage urbain, leau, la
collecte et le traitement des déchets, la distribution
délectricité, etc ...
59. La péréquation
entre les secteurs de leau et lélectricité peut
amener des possibilités intéressantes et présente
lavantage dune facturation unique auprès des
usagers.
60.
Pour le financement de
grands ouvrages à buts multiples il nest pas rare que des
péréquations tarifaires soient réalisées entre leau
municipale et leau dirrigation, voire industrielle
nécessaire à de grands établissements.
c) Péréquation
entre usagers
61. Il peut être
considéré de " bonne justice sociale " de
faire payer, ceux qui en ont les moyens, un peu plus cher que le
prix moyen pour favoriser laccès à leau des plus
démunis. Cest notamment le principe qui sous-tend, avec la
recherche dune meilleure économie de leau utilisée,
la mise en place de tarifs progressifs, avec une première classe
de prix très peu cher pour une tranche de consommation limitée,
correspondant aux besoins minimaux de lalimentation et de
lhygiène.
d) Péréquation
entre fonctions
62. Cest le rôle
des redevances instaurées notamment au niveau des bassins
versants que dassurer une solidarité amont-aval et
dassurer le financement de fonctions dadministration
générale, dacquisition de données ou la réalisation
douvrages ou daménagement dintérêt
général.
· III.7.3) La recherche du
moindre du coût global
63. Dans tous les cas,
cest dabord une bonne adéquation des investissements
réalisés aux besoins réels et une gestion efficace qui sont
les garants du moindre coût de leau pour tous.
On ninsiste en
effet pas assez, dans les études et les informations
diffusées :
64. - dune
part, sur les coûts importants réellement payés, par
certains villageois ou les populations des quartiers
défavorisés, pour accéder à leau en faible
quantité qui leur est vitale :
* le coût du
travail des femmes qui vont à pied chercher leau
chaque jour à de grandes distances du village est rarement
comptabilisé,
* il en est de même
de dépenses individuelles engagées par les habitants pour
sassurer de leau dont ils ont besoin pour leurs
usages (citernes ou réservoirs, forage et pompage,
traitement de désinfection ...) dont les montants sont mal
connus, mais dont la sommation peut arriver à des montants
très significatifs qui pourraient être mieux investis
collectivement.
* le prix payé par
les plus pauvres pour un seau deau distribué à la
citerne par des " circuits parallèles "
est lui-même beaucoup plus élevé, proportionnellement, que
celui des services collectifs.
Dune manière
générale, les rares études réalisées sur les
dépenses individuelles de compensation des services
défaillants, montrent que la somme de celles-ci permettrait
de financer dimportantes améliorations collectives.
*
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